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I-SLAM : ISLAM POSTMODERNE








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samedi 5 mai 2018

Municipales tunisiennes 2018

Réponses à Marine Caleb
(L’Orient Le Jour)
auteure de l'article : 
Les enjeux des municipales tunisiennes pour Ennahdha et Nidaa Tounès*


INTRO

Disons, tout d’abord, que la Tunisie constitue à mes yeux une exception (titre de ma trilogie dont a été publié le tome 1 : L’Exception Tunisie); or, elle est actuellement en puissance faute de courage politique et de refus des partenaires d’Occident comme d’Orient que s’épiphanise le modèle en gestation. Aussi, tout est possible au pays, le meilleur comme le pire.
Il faut noter qu’on a encore plutôt le pire, malgré ce qu’on peut dire; et je veux croire que le meilleur reste à venir. Forcément. Faut-il y travailler; mais surtout y croire.
J’illustre cette conviction à travers les idées suivantes que je développe dans mes écrits, dont le dernier en arabe titré Conquêtes Tunisiennes. Postmodernité islamique, et détaillant ce que serait l’islam tunisien, un islam de son temps :
-       L’islam politique est imposé à la Tunisie;
-       L’islam politique peut bien y durer, mais en évoluant grâce à la veine soufie;
-       La démocratie en Tunisie, et dans le monde doit être réinventée avec une postdémocratie (objet du tome 3 de ma trilogie)
-       Ce qui serait le produit de l’éthique en politique, la poléthique à laquelle j’appelle et la conscience en droit, loi du juridisme du similidroit.

MES RÉPONSES AUX QUESTIONS

Q 1 : Où en sont les relations entre les deux partis Nidaa Tounes et Ennahdha ? 

         R 1 : Comme on pratique la politique à l’antique, on joue au lion et au renard; il y beaucoup d’esbroufe. Mais les deux partis sont liés par leurs intérêts convergents d’occuper le pouvoir et d’y bénéficier à fond des lois de la dictature qui sont celles d’un État autoritaire.
Donc, il y a bien plus la théâtralité d’une sorte d’opéra bouffe de la  politique que juste une politique politicienne, car on est obligé de jouer dans les limites d’un scénario contraignant dont on a fixé soi-même la trame : celui de la révolution et de ses impératifs démocratiques. On est de la sorte amené à simuler et à dissimuler avec des lignes rouges. S’il y a une expression qui résumerait cette situation, c’est bien celle du consensus non moriendi, un compromis pour ne pas perdre ou mourir. Car, au vrai aucun des deux partis ne peut prétendre représenter les traits caractéristiques de l’âme populaire tunisienne qui est bien plus spirituelle que portée sur la religiosité, bien plus libertaire que légaliste.
Il est un théâtre de jeu de masques et de rôles se jouant avec des slogans creux et où l’inertie des uns et la ruse des autres, soigneusement corsetées dans e fallacieux emballage du consensus, empêchent d’évoluer plus vite dans un pays où les masses sont déjà en avance sur ses élites.
Car s’il y a eu révolution en Tunisie, elle a été d’abord et avant tout dans la mentalité du peuple. Il reste que cela reste dans une confusion totale; ce qui n’est pas étonnant au vu de la confusion des valeurs chez les élites censées indiquer le juste de l’injuste, le moral de l’immoral. La preuve en est le maintien, sept ans après sa chute, de l’arsenal répressif de la dictature.
Ainsi, il faut bien le savoir, les juges tunisiens agissent appliquent les lois de la dictature, devenues illégales qui plus est depuis l’adoption de la constitution. 

Q 2 Peut-on compter sur l'UPL ou le pouvoir politique se bipolarise entre Nidaa et Ennahdha ? 

         R 2 : Au vrai, on ne peut échapper à la polarisation même si elle peut varier en évoluant. Elle est d’ailleurs appelée à être enfin favorisée officiellement par le futur projet de modification de la loi électorale, l’actuelle ayant été spécifique à la période transitoire issue de ce que je nomme Coup du peuple ou révolution tunisienne et arrangeant pas mal d’intérêts. 
Car il faut savoir que, si le parti islamiste est uni en apparence, il n’est pas moins parcouru par des divisions occultes agissant pour une Tunisie traditionaliste. Et si le parti supposé moderniste est émietté, il ne fédère pas, ne serait-ce que par un fatal vote utile, des tenants d’une Tunisie moins traditionaliste. Il arrive ainsi que l’on trouve des traditionalistes hors de leur supposé camp et des modernistes dans le camp des supposés intégristes comme le montre par exemple la question du cannabis et de l’homosexualité. Le moindre mal pour éviter un éclatement est d’entretenir le flou avec un scrutin qui favorise les différences, mais dans me cadre d’un parti uni quitte à encourager l’apparition de partis et de personnages, non seulement sans aucune envergure ni éthique, mais insignifiants aussi sans aucune représentation véritablement enracinée populairement, une sorte d’artefact politicien.
  
Q 3 Les municipales vont-elles empirer cette bipolarisation ? 

         R 3 : Les municipales sont appelées à reproduire le schéma actuel en le complexifiant. Rien de bon n’en sortira tant qu’on n’aura pas commencé, et au préalable, à toiletter les lois nationales de l’ancien régime.
En effet, le véritable blocage est moins institutionnel que psychologique. Il est dans la tête des élites restées figées sur le passé, de la Tunisie ou de l’islam, autoritaires donc civiles et religieuse à la fois.
Le péril actuel en Tunisie est que s’ajoute à la dictature de religion civile qui l’a gouvernée longtemps, celle d’une religiosité islamiste et que cela se diffracte dans le pays à la faveur de l’absence de lois justes au niveau national, de nature à empêcher les dérives au niveau de la vie politique locale.

Q 4 Pourquoi le code des collectivités peine à être voté ? Quels sont les points de divergences ou de tensions ?

         R 4 : Pour la raison évoquée ci-dessus, on s’oppose avec véhémence sur la nature de la décentralisation et de l’étendue des pouvoirs locaux. Pour d’aucuns, cela signifie la revitalisation de l’État, pour d’autre, ce sa perte.
Au vrai, les deux ont raison en l’état actuel de lois scélérates et illégales.
C’est d’abord la réforme législative touchant aux questions essentielles sensibles dont on ne veut pas parler, et qui sont pourtant de nature à débloquer les  esprits des freins qui s’y nichent et qui sont à la base de la conception de l’État : démocratique, autoritaire, autocratique.
La question des droits et libertés de la vie privée est ici essentiel, comme l’égalité successorale et le droit au sexe. On aura ainsi noté, sur la question urgente en termes de symbolisme, que  la remise du rapport de la Commission constituée pour réaliser l’égalité successorale qui été remise au lendemain des élections. Une manoeuvre de plus ou la preuve que l’on ne veut pas assumer ce qui est inévitable pour avancer.

Q 5 Pourquoi ces divisions dans le vote pour l'IVD ? 

         R 5 : L’IVD est l’exemple typique de ce qu’il ne fallait pas faire en Tunisie. Elle a été voulue par mimétisme d’une politique à l’antique et instrumentalisée pour des visées idéologiques.
On n’a fait que plaquer à la Tunisie un schéma désincarné. Comment réaliser, en effet, la justice et la dignité quand le cadre législatif de la dictature est resté en l’état?
Il aurait fallu commencer d’abord par la réforme législative; après on aurait eu à parler de justice transitionnelle.
Aussi, l’IVD est  devenue une instance pour servir surtout les profiteurs cherchant surtout une réparation matérielle. D’ailleurs, nombre de vrais militants se sont abstenus de déposer leur dossier, car leur conception du patriotisme exclut la moindre réparation. C’est mon cas, ayant été brimé sous Ben Ali, exclu du cadre diplomatique pour mon combat pour les droits de l’Homme à l’intérieur de l’Administration et n’ayant toujours pas eu justice bien que mon droit ait été validé par la Commission Alor constituée après le 14 janvier 2011. Je ne pouvais cautionner les dérives immorales de l’IVD alors que je milite pour la morale en politique.  Et tant pis pour mes droits ! Et je ne suis pas le seul dans cette situation. Nombre d’autres Tunisiens brimés par la dictature ont fait comme moi, ceux pour qui la patrie compte avant tout.  

Q 6 De même, pourquoi les membres de la Cour constitutionnelle peinent à être élus? Quels sont les enjeux de la cour pour les partis? 

         R 6 : C’est l’absence de volonté politique (je dirais poléthqiue) pour une véritable démocratie et un État sérieux de droit qui explique le blocage actuel.
On se soucie plus de contrôler l’évolution de la législation que de la toiletter de ses lois scélérates.
On est encore loin d’avoir une vision juste et humaniste du vivre-ensemble en Tunisie, car chaque partie peut le coucher dans son propre lit de Procuste.
C’est le dogmatisme des uns et des autres qui bloque la constitution de cette cour qu’il soit religieux ou profane.
Il faut dire, par ailleurs, que si on ne faisait pas montre d’un juridisme excessif, amis aussi de laïcisme, on aurait avancé bien plus vite en s’attaquant déjà par de simples décisions administratives ou politiques les questions sensibles et qui fâchent.  Cela aura enlevé tout intérêt à la tragicomédie actuelle, puisqu’on se sera débarrassé de pas mal de questions qui alimentent le blocage actuel, comme l’abolition de l’homophobie, la dépénalisation du cannabis, l’égalité successorale, le droit au sexe hors mariage, le droit à consommer librement l’alcool sans restrictions morales fallacieuses, etc.   
Il est clair qu’on aurait pu, sur toutes ces questions, avancer par simple décision politique de moratoire à l’application de leurs bases légales, ou par décision ministérielle aux forces de l’ordre de se conformer à la constitution en n’arrêtant plus les gens ou aux juges de ne plus instruire leurs dossiers. Ou encore par circulaires retirant le cannabis de la liste des stupéfiants ou interdisant le test anal en Tunisie, ce qui aurait empêché l’application du texte scélérat sur l’homophobie, un reliquat colonial contraire à la lettre et à l’esprit de l’islam bien compris.  

Q 7 Pourquoi avoir reporté les municipales 4 fois ? 

         R 7 : Les municipales auraient dû être organisées les premières, bien avant les législatives et la présidentielle pour se soucier en premier de l’état des villes dans une situation de réelle détresse.
J’y ai appelé, et on ne l’a non seulement pas fait, mais  on n’a même pas encore  conformé la législation aux acquis de la constitution, estimant qu’une telle réforme capitale pouvait attendre.
Or, il est des parties qui n’ont pas intérêt à ce que la loi change ayant surtout pour souci exclusif de contrôler les pouvoirs locaux à des fins partisanes.
Le jeu politique et les calculs politiciens ont fini par amener les autorités à se résoudre à la tenue de ces élections même si le contexte y reste fort défavorable.
D’ailleurs, il ne serait pas surprenant que si un grave incident arrive, ce qui n’est pas totalement exclu, on suspende le processus électoral. Car la Tunisie doit rester vigilante. 
Il faut savoir que cette éventualité, combien même elle semble saugrenue, reste théoriquement envisageable, le processus électoral pouvant être juridiquement interrompu de deux manières :  par une décision souveraine de l’Isie, l’instance supérieure des élections, et par une décision du président de la République pour cause de péril imminent.
Et croyez bien que les deux gourous qui tirent les ficelles de comédie politique du pouvoir dans le pays y ont pensé, y pensent et en useraient s’ils l’estiment nécessaire à leurs intérêts stratégiques.

* Intégralité de l'interview qui a donné lieu au billet publié le samedi 05 mai 2018 sous le titre :